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Argumentaire

 

Ce qu’on appelle désormais la « théorie de la reproduction sociale » émerge en France depuis quelques années maintenant. Après le succès rencontré par le manifeste Féminisme pour les 99% paru en 2019, en attestent la traduction en 2020 de l’ouvrage collectif dirigé par Tithi Bhattacharya Avant 8 heures, après 17 heures. Capitalisme et reproduction sociale ; le dossier « Reproduction sociale » de la revue Actuel Marx en 2021,et en 2022 la traduction du classique de Lise Vogel Le marxisme et l’oppression des femmes. Vers une théorie unitaire. Il faut ajouter à ces évènements éditoriaux récents plusieurs articles parus régulièrement dans les revues en ligne Contretemps et (anciennement) Période, la traduction rapide des travaux de Silvia Federici depuis Caliban et la sorcière en 2014, et enfin plusieurs colloques dédiés aux féminismes matérialistes (dont « Féminismes matérialistes. Héritages épistémologiques et politiques, réappropriations contemporaines », à Paris en 2020 ; et « Care(s) matérialiste(s) » en 2022).

 

 Icone 99%   Icone TB   Icône Actuel Marx  Icone Federici  Icone Federici 

 

Cependant, la réception des théorisations féministes de la reproduction sociale dans le contexte académique français demeure relativement lente si on la compare à sa diffusion dans d’autres pays. Deux raisons semblent pouvoir l’expliquer : d’une part la prééminence, dans l’économie politique féministe, de la perspective matérialiste développée par Christine Delphy et plus largement par l’école matérialiste française, qui pendant longtemps a marginalisé l’approche alternative développée par les autonomistes italiennes ; d’autre part l’association spontanée du concept de reproduction à la sociologie de Pierre Bourdieu et, dans une moindre mesure, à la philosophie de Louis Althusser. Dans ce contexte, un important travail de présentation et d’articulation des enjeux théoriques de la reproduction sociale reste encore à mener. Partant de ce constat, le colloque est structuré autour de deux axes d’enquête : un axe historique ou diachronique, et un axe contemporain et synchronique. 

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Nous souhaitons en effet d’abord revenir aux approches féministes classiques de la reproduction sociale et les mettre en dialogue avec les propositions alternatives qui les ont nourries, qu’elles ont discutées et déplacées, ou qui se sont développées en parallèle dans le champ de la théorie critique. Marx, Althusser, Bourdieu et l’École de Francfort sont à cetégard des interlocuteurs et peut-être des partenaires inévitables. Quant au second axe d’enquête, il entend cartographier le paysage contemporain des théories de la reproduction sociale et les confronter à d’autres interventions critiques sur les concepts cruciaux de travail, de nature, d’exploitation et de domination par exemple. Il sollicite donc à la fois une discussion interne à ce paradigme dont la crise financière de 2007-2008 a précipité la renaissance, et sa mise en conversation externe avec l’écoféminisme, le marxisme écologique, l’éthique et la politique du care, la thèse de la centralité du travail, le concept d’intersectionnalité ou encore la théorie des communs. Le colloque s’ouvrira par une conférence de Nancy Fraser, qui a joué et joue encore un rôle majeur dans la redécouverte de la théorie de la reproduction sociale et dans la mise au jour de son importance pour la philosophie sociale et politique de notre temps.

Version téléchargeable de l'argumentaire du colloque PDF

 

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